Au coeur des enjeux économiques et environnementaux, la transition énergétique fait l'objet de nombreux dispositifs : nouvelles lois, incitations financières, programmes de rénovation... Toutefois, un aspect est souvent pointé du doigt, études à l'appui, notamment dans le cadre du Coup de pouce CEE : les économies d'énergie générées ne reflètent pas exactement la réalité.
Témoignage de Marina Offel, responsable des affaires publiques et juridiques chez Hellio, qui revient sur l'importance d'une meilleure considération de cette notion d'économies d'énergie réelles plutôt que théoriques ou amplifiées. Ceci dans l'optique d'une mesure optimale de l'impact des opérations en matière de réduction de la consommation énergétique.
Qu'est-ce que la notion « d'économies d'énergie réelles » ?
Dans le dispositif des CEE actuel, certaines opérations sont « bonifiées ». C'est-à-dire qu’elles permettent de percevoir davantage de certificats, lorsque les travaux sont réalisés au bénéfice de ménages dits précaires énergétiques, ou qu’ils permettent un gain énergétique important. Les fameuses offres « Coup de pouce » sont des bonifications.
Mais ces offres, puisqu’elles multiplient le nombre de certificats perçus par opérations réalisées, ne correspondent pas aux économies d’énergie réalisées. Les économies d’énergie réelles correspondent à la véritable équivalence, en termes d’énergie économisée, des travaux réalisés. Sans prise en compte des bonifications, donc.
Lire aussi : les 6 propositions de Hellio pour favoriser les économies d'énergie réelles.
En quoi la prise en compte des économies d'énergie réelles est-elle importante ?
La prise en compte des économies d’énergie réelles est essentielle, car elle est corrélée à la réalité : la diminution de l’énergie consommée et, en conséquence, la baisse des émissions de gaz à effet de serre ainsi qu’une facture réduite pour les ménages.
Les bonifications ont deux conséquences :
- Elles diminuent l’impact énergétique du dispositif puisque les obligés ont moins d’opérations à réaliser pour respecter leur obligation.
- Ensuite, elles incitent les acteurs à réorienter leurs efforts vers les investissements bonifiés au détriment des autres opérations.
Se dirige-t-on vers plus de contrôle des résultats dans le secteur de la rénovation énergétique ?
Le bilan des « Coups de pouce » est donc négatif : en créant des CEE bonus certifiant des économies d’énergie fictives, ils ont fortement réduit l’impact énergétique du dispositif des CEE depuis 2019. Ils n’ont pas conduit à une massification des travaux favorables à la baisse des coûts.
Il est actuellement évoqué dans le secteur par certaines études la possibilité de remplacer ces opérations « Coups de pouce » par des bonifications valorisant la qualité des opérations : bonifier les travaux de rénovation énergétique incluant une assistance à la maîtrise d’ouvrage ou prévoyant un contrôle ex-post de l’impact énergétique ou encore ceux réalisés par des professionnels de la rénovation certifiés par des labels sélectifs de qualité.
Le lancement de « MonAccompagnateurRénov' » et ses audits obligatoires vont dans le sens de ce genre de contrôle, pour s’assurer que les travaux mènent à une réelle économie d’énergie, ainsi qu’une amélioration du confort des ménages.
Quels sont les freins au développement de cette démarche (ie la prise en compte des économies d’énergie réelles) ?
Les bonifications, puisqu’elles sont dirigées vers les ménages précaires et permettent de réaliser des travaux d’efficacité énergétique à moindre coût (offres à 1 euro), sont un instrument important de massification de la rénovation. C’est la raison pour laquelle de nombreux acteurs du secteur s’inquiètent d’un retour aux économies d’énergies réelles.
Comment Hellio s'engage-t-il pour une meilleure considération des économies d'énergie réelles ?
Hellio est membre de l’Institut national de l'Économie circulaire et a rédigé en ce sens un amendement visant à l’inclusion de l’économie circulaire dans le dispositif des Certificats d’économies d’énergie. L’objectif est de prendre en compte la provenance des matériaux et leur cycle de vie pour calculer les primes. Cette évolution permettra à la fois d’appuyer les filières françaises et d’économiser de l’énergie sur tout le cycle de vie des produits utilisés dans la rénovation énergétique.
Nous encourageons les ménages qui souhaitent réaliser un changement de mode de chauffage à rénover dans le même temps l’isolation de leur logement.
5e période des Certificats d'économies d'énergie : le déclic ?
La cinquième période du dispositif (P5) a démarré le 1er janvier 2022, jusqu'au 31 décembre 2025. Va-t-elle donner plus de poids aux économies d'énergie réelles ? En tout cas, le 39ème arrêté de décembre 2021 révise de nombreuses fiches standardisées, et renforce certaines exigences techniques. L'objectif de baisse des consommations a également été revu à la hausse (3 100 TWh cumac).