Les prochaines élections européennes auront lieu le 9 juin 2024. Elles fixeront le cap de la politique européenne des cinq prochaines années, notamment en matière de transition écologique et énergétique. Hellio, acteur de référence de l’efficacité énergétique, propose son décryptage.
Les citoyens au cœur des élections européennes du 9 juin 2024
Concrètement, les élections européennes désignent les futurs membres du Parlement européen : les eurodéputés. Le nombre d’eurodéputés s’élevait à 705 depuis le retrait du Royaume-Uni, le 31 janvier 2020. Il a été par la suite réévalué à 720, dont 81 représenteront directement la France à l’issue des élections du 9 juin (soit deux de plus qu'auparavant). Ces élections européennes se déroulent tous les 5 ans au suffrage universel direct. Le Parlement européen est chargé d’adopter les actes législatifs, de contrôler l’exécutif européen et de se prononcer sur toutes les dépenses de l’Union européenne. Il est le seul organe européen élu directement par les citoyens de l’Union.
Le droit européen : une application certaine et effective partout dans l’Union européenne
Les règles émises par l’Union européenne influencent largement le droit national des Etats membres, et à plus forte raison en matière d’énergie. Selon différentes études1, 20 % des lois françaises seraient d’origine européenne. Parmi ces normes, les règlements et décisions sont d’ailleurs directement applicables au sein des Etats membres, sans mesure de transposition.
À l’inverse, la transposition des directives en droit interne est obligatoire et constitue même une exigence constitutionnelle en droit français. Par exemple, la loi fixant les Orientations de la Politique Énergétique du 13 juillet 2005 - dite loi “POPE” - est une transposition de la directive Européenne sur l’Efficacité Énergétique. C’est cette loi qui a créé le dispositif des Certificats d’économie d’énergie, obligeant les fournisseurs d’énergie à contribuer concrètement au financement d’opérations d’économies d’énergie.
Enfin et en cas de mauvaise application du droit de l’Union, la Commission peut engager une procédure formelle d’infraction contre l’Etat membre en question, pouvant déboucher sur la saisine de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) et des sanctions financières. Les décisions de la CJUE aboutissent à la modification des droits nationaux.
L’infraction française en matière d'énergie renouvelable En 2020, la France était le seul État membre à ne pas avoir atteint ses objectifs de déploiement des énergies renouvelables. La directive sur les énergies renouvelables prévoit en effet un objectif de 23 % de renouvelables dans la consommation finale brute d’énergie française en 2020 et elle en était à 20,7 % en 2022. Or, la France n’avait pas acheté la part d’énergie renouvelable, sous forme de « mégawatts statistiques » aux États membres excédentaires, nécessaire pour compenser son déficit. Cette infraction avait conduit à d’intenses négociations entre la France et la Commission européenne. La France avait d’ailleurs rappelé son accélération ces dernières années du déploiement des énergies renouvelables, notamment du solaire et du biogaz. Elle avait également souligné le caractère décarboné de son mix électrique grâce à l’énergie nucléaire. |
Ce cas d’espèce est révélateur de la volonté de la Commission européenne à prendre en compte les efforts des Etats membres et l’absence de condamnation de la France témoigne des rapports de force existants au sein de l’Union. Si l’Institution définit la stratégie de transition écologique à l’échelle européenne, son déploiement effectif n’en reste pas moins le fruit de compromis entre les Etats membres dans leur diversité.
Le rôle essentiel du Pacte vert européen dans la transition écologique
Le Pacte vert européen fixe le cap de l’Union européenne en matière de transition écologique pour les décennies à venir. Son objectif est d’atteindre la neutralité carbone en 2050 en mobilisant 1 000 milliards d’euros au cours de la décennie 2020. A plus court terme, le paquet “Fit for 55” vise à diminuer d’au moins 55 % les émissions nettes de gaz à effet de serre d’ici 2030 par rapport aux niveaux de 1990. Ce paquet comprend 13 mesures juridiquement contraignantes (directives et règlements) dont la réduction des émissions de gaz à effet de serre des bâtiments et le doublement de la part des énergies renouvelables dans le mix énergétique des Etats membres.
La directive “RED III” sur les énergies renouvelables du 18 octobre 2023 concrétise cette dernière mesure. Elle prévoit notamment une augmentation de 32 % à 42,5 %, voire 45 %, de la part d'énergies renouvelables dans la consommation finale brute d'électricité de l'Union en 2030 et l’accélération des procédures d'octroi de permis pour le rééquipement, l'installation d'équipements d'énergie solaire, de pompes à chaleur.
De nombreuses mesures du Pacte vert ont des effets très concrets sur la vie des citoyens européens. A titre d’exemple, la directive sur la performance énergétique des bâtiments, adoptée le 12 avril 2024, prévoit le déploiement d’installations d’énergie solaire sur tous les parcs de stationnement couverts neufs qui jouxtent un bâtiment au plus tard le 31 décembre 2029. Ce déploiement est conditionné à la faisabilité technique, économique et fonctionnelle de ces installations. Plus globalement, cette directive fixe le cadre de réduction des émissions et de consommation d’énergie dans les bâtiments de l’ensemble de l’UE.
Elle fixe pour chaque État membre un objectif de :
- Réduction de la consommation moyenne d'énergie primaire des bâtiments résidentiels de 16 % d'ici à 2030 et de 20 à -22 % d'ici à 2035 ;
- Rénovation de 16 % de bâtiments non résidentiels parmi les moins performants d'ici à 2030 et les 26 % les moins performants d'ici à 2033.
Le 22 avril 2024, la Commission européenne a lancé une coalition pour le financement de l’efficacité énergétique. Cette initiative vise à augmenter les investissements, particulièrement privés, dans la transition écologique en raison de l’insuffisance des investissements publics. La mise en œuvre de cette coalition reflète le rôle central de l’Union européenne dans la transition énergétique.
Les Institutions européennes jouent donc un rôle prépondérant dans la définition et la mise en œuvre de la politique de transition écologique et énergétique, et son applicabilité en droit national. Le scrutin du 9 juin prochain constitue donc une étape déterminante pour les 5 années à venir.
1 “Les interventions de l’UE au niveau national : quel impact ? Institut Jacques Delors, 2009
“Normes européennes, loi française : le mythe des 80%” Terra Nova, 2010
“The Europeanization of domestic legislature” Sylvain Brouard, Olivier Costa, Thomas Konig, 2012
Hellio décrypte l'actualité réglementaire à travers son calendrier de l'efficacité énergétique